Source : El modjahid
«Il est tout à fait légitime que les pays sauvegardent leur solvabilité et si la contrainte sur notre balance des paiements se poursuit, nous prendrons d’autres mesures ». Le ministre du Commerce, M. Bakhti Belaïb, qui a tenu à démentir, depuis le Forum Economie d’El Moudjahid ; les informations faisant état de la préparation d’une liste de produits à interdire à l'importation a affirmé qu’il s’agit d’une « fausse information » et qu’il n’y avait de liste de produits qui seront « prohibés à l'importation ».
Le ministre, a néanmoins indiqué que tous les produits non intégrés dans les accords avec l'UE, la Grande zone arabe de libre-échange, et l’accord préférentiel avec la Tunisie, ne bénéficieront plus de franchise de douane. « Les produits dont nous ne sommes pas sûrs de l'origine ne bénéficient désormais plus de la franchise et nous avons des preuves que ces produits ne sont pas d'origine des pays avec lesquels nous avons conclu des accords », a affirmé le ministre qui précisera que « cette liste de produits, qui risquent de ne plus bénéficier de franchises, sera connue prochainement.
C’est la déclaration faite par le ministre du Commerce, hier, lors de son passage au forum économique d’El Moudjahid. M. Bakhti Belaïb, qui répliquait par rapport à une question sur l’éventualité de l’élargissement de la liste des produits interdits à l’importation à 2.000 autres (produits) considérés comme superflus, a souligné, à ce propos, qu’il a été constaté que beaucoup de produits importés bénéficiaient de franchises de douanes mais étaient originaires de pays non intégrés dans les zones avec lesquels on avait signé des accords. « Désormais, les visas d’entrée sur le territoire seront accordés uniquement aux produits dont on est sûrs de l’origine, le reste ne bénéficiera plus des franchises de douanes », a spécifié le ministre. Et d’ajouter : « Aujourd’hui, nous avons un système des licences d’importation et les produits concernés n’accèderont plus au marché ».
A ce propos, le ministre a rappelé que le système en question concerne trois produits, à savoir, les véhicules, le ciment gris et le rond à béton. Des produits qui « pesaient assez lourd sur le budget de l’Etat. Aujourd’hui, et grâce à ce système qui fixe les quotas des importations, « nous avons gagné plus de 6 milliards de dollars par rapport à 2014 », a indiqué M. Bakhti Belaïb. Aussi, les licences d’importations seront élargies à d’autres produits, notamment industriels (électroménagers et électroniques) et à certains produits agricoles (maïs, soja) dont le coût des importations avoisine les 3,5 milliards de dollars, a précisé le ministre. Ces mesures ont permis de réduire sensiblement les importations qui ont atteint 17 Mds de dollars au premier semestre 2016, soit 20% de moins par rapport à la même période de 2015, a-t-il indiqué. Et de rassurer que « la rationalisation n’atteindra pas les facteurs de croissance ».
Licences d’importation : le difficile consensus
Dans le même contexte, le ministre a fait savoir que l’Algérie, devenue une aire de stockage, était « contrainte d’en réduire les quotas des importations » à travers l’imposition de licences. « Notre objectif, au départ, était d’introduire une transparence dans le segment », a-t-il souligné. M. Bakhti Belaïb a déclaré, dans ce sens, qu’il « est difficile de faire le consensus » et que, les concessionnaires avaient le droit de contester les quotas fixés. A ce titre, il a rassuré que les « contestations fondées étaient acceptées ». Selon le ministre, « nous devons apprendre à respecter la raison d’Etat ». Le ministre a parlé, à ce propos de la nécessité d’axer les efforts sur l’encouragement des exportateurs dont le nombre est passé, de 1.100 à 1.700 en l’espace de six mois, notamment dans le segment de l’agriculture. « Ce sont des initiatives étrangères encouragées par la qualité des produits et les coûts abordables », a-t-il indiqué. « Aujourd’hui, l’acte d’importer est plus facile et plus rémunérateur et il faudra inverser cette tendance », a déclaré le ministre du Commerce qui a parlé de contraintes à l’exportation liées entre autres aux règlements de la Banque d’Algérie (bureaux de liaison, domiciliations, délais de rapatriement des produits de l’exportation), au registre du commerce, et à la faiblesse de la logistique à l’export, le transport notamment.
L’Accord d’association : une référence pour les négociations avec l’OMC
Des négociations ont été engagées avec l’UE à l’effet d’adapter l’Accord d’association, qui constitue « une référence pour les négociations avec l’OMC », à la situation économique et aux intérêts du pays. Les échanges avec l’UE sont passés de 9 à 30 milliards de dollars depuis la signature de l’Accord en septembre 2005, mais les « investissements européens, dans notre pays, sont demeurés faibles », a-t-il rappelé. Sachant que les deux tiers de nos échanges se font avec l’UE, il est « fondamental d’aller vers un accord pour rééquilibrer ces derniers », fera-t-il remarquer. Pour le cas de la GZALE, le ministre a fait savoir que, « l’Algérie est le seul pays qui maintient la liste négative ». L’Algérie qui dispose d’une base industrielle veille au maintien de la valeur ajoutée à un seuil de 60%, un niveau contesté par les pays arabes qui se contentent de 40% n’étant pas dotés d’industries à protéger. Aussi, le ministre a déclaré que pas moins de 40 produits qui font l’objet d’échanges dans le cadre de cette zone sont toujours maintenus dans la liste négative.
Marché informel : près de 50% des produits agricoles dans le circuit
L’Etat a mobilisé plus de 18 milliards de dinars pour éradiquer le marché informel. Si certains espaces classés comme tels ont disparu, d’autres ont réapparu. Aussi, le département du commerce a saisi le ministère de l’Intérieur pour faire en sorte que les ‘‘commerçants’’ rejoignent les infrastructures qui leur sont affectées. Le ministre qui a admis que certains marchés étaient mal localisés a déclaré que près de 50% des produits agricoles s’écoulent en dehors des marchés de gros d’où la non-maîtrise des prix. Actuellement, 47 marchés de gros sont recensés et devront être consolidés par 8 infrastructures nouvelles dont deux devront être réceptionnées à la fin de l’année Aïn-Defla et Sétif).
Importations : le Credoc n’a pas atteint son objectif
Institué par la LFC de 2009, le crédit documentaire (Credoc) a été imposé comme étant le moyen unique de financement des importations. Ainsi, les opérateurs économiques se sont vus interdire le recours aux autres modes de paiement à l’international. Le Credoc, largement contesté, est défini comme étant l'engagement pris par la banque de l'importateur de garantir à l'exportateur le règlement des marchandises contre la remise de documents attestant de l'expédition et de la qualité des marchandises prévues au contrat. Il devait constituer un gage de sécurité pour toutes les parties au contrat. Le dispositif qui a été allégé conséquemment aux revendications des opérateurs économiques, a été également dénoncé par l’actuel ministre du Commerce qui fait état d’« arnaques » sous ce chapitre. Pour ceux qui revendiquent un réaménagement de cette disposition, M. Bakhti Belaïb a précisé qu’il « faudra attendre une modification de la loi qui l’a imposé pour que le Credoc ne soit plus le mode de paiement exclusif de paiement des importations. En attendant, le Credoc est allégé », a-t-il rappelé.
Réintroduction de taxes à l’importation : légitime
A une question sur la réintroduction de taxes sur certains produits à l’importation dans le cadre de le projet de loi de finances 2017, le ministre a qualifié ces dernières de « légitimes ». Une décision motivée par le constat de « délinquance dans la sphère commerciale ». M. Bakhti Belaïb qui a relevé cet état de fait a évoqué le cas de conteneurs bloqués au niveau de ports secs depuis 2012 du fait que leurs propriétaires ne se sont pas présentés pour lever leurs marchandises, et pour cause... certains de conteneurs contenaient des produits destinés à l’incinération. « Des simulacres pour des opérations de transfert de devises, souvent avec la complicité d’étrangers », dira le ministre. Un phénomène, a-t-il souligné, qui a atteint « un niveau inquiétant car il porte atteinte à l’économie du pays ».
OMC : le coût de sa non-adhésion est plus important
L'Algérie qui a mené 12 rounds de négociations multilatérales et traité 1.900 questions liées essentiellement à son système économique est appelée à reprendre le processus des négociations avec l’OMC, car le coût de sa non-adhésion est plus important que son adhésion à cette organisation qui copte 164 Etats membres et représente plus de 99% du commerce mondial. Et pour cause, 98% des partenaires commerciaux de l’Algérie y son membres.
« Est-il raisonnable de rester en marge de ce système alors que des pays qui n’ont aucune actualité mondiale sont déjà au sein de cette organisation », s’est interrogé le ministre.
L’autre argument qui milite dans ce sens réside dans le fait que « le ticket d’accès à l’OMC devient de plus en plus coûteux », a souligné M. Bakhti Belaïb. Le ministre a fait part, à ce propos que la règle des 49/51% et l’importation de certains médicaments figuraient parmi les questionnements de l’OMC.
Et de rassurer que les clauses de l’OMC prévoient des mesures de sauvegarde. Néanmoins, a déploré le ministre, nous n’avons pas une administration économique en mesure de contrôler nos engagements avec nos partenaires et déceler les mesures anti-dumping. « Notre administration économique n’a pas les capacités et n’est pas qualifiée pour porter nos revendications au sein de l’organe de règlement des différents de l’OMC », a-t-il affirmé.
Dans le même contexte, le ministre a évoqué des discussions avec les ministères concernés pour améliorer et enrichir les réponses aux questions de l’OMC.